-Bonjour docteur !
-Bonjour cher patient, quel bon vent vous amène cette fois-ci ?
-Je suis très inquiet, docteur. Depuis que je me suis réveillé, j’ai TRES MAL à mon squelette !
-A votre squelette ??! Rien de cassé j’espère ? Vous vous sentez peut-être un peu sur les rotules ?
–Mais non docteur c’est grave ! Je subodore la confirmation de mes plus noirs pressentiments : Ça sent le sapin pour moi ! Je perçois des signaux avant-coureurs très clairs et ils m’annoncent la visite imminente de la grande faucheuse !
-Bon sang ! Il va falloir faire vite ! Avant que cette sale garce ne pénètre dans ma salle d’attente avec l’intention de vous occire en pleine consultation ! Dites-moi : De quelle partie de votre squelette souffrez-vous ? Sachant que votre architecture osseuse est constituée d’un peu plus de deux cent fragments divers et variés disséminés un peu partout, il serait préférable que n’ayons pas à vous radiographier de la tête aux pieds. Autrement nous parviendrions au mieux à localiser toutes les pièces défectueuses post mortem, environ dans un délai de deux semaines après la date de vos obsèques. Agissons sans tarder pour vous soustraire à cette terrible agonie…
-Hé bien pour commencer je ressens d’intenses douleurs juste-là dans l’articulation du coude. Mais je subis également de très violents coups de boutoir ici au sommet de mon crâne. Je crains m’être décroché la mâchoire. Et puis aussi m’être fissuré plusieurs côtes. Mon squelette est foutu !
-Bigre ce sont là bien trop de souffrances à endurer pour un seul homme. ! Une première question qui pourrait augmenter nos chances d’établir un diagnostic fiable et susceptible d’augmenter votre espérance de vie : N’auriez-vous pas par hasard passé presque toute la nuit en compagnie d’une bande de joyeux drilles à déconner et à vous bidonner ? Profitant de l’occasion pour faire l’impasse sur toute forme de modération. De mon avis de spécialiste, les symptômes que vous me décrivez en ce qui concerne votre coude et votre crâne indiquent les séquelles d’une biture d’enfer. Et pour les côtes et la mâchoire, je pencherais en faveur de simples effets secondaires consécutifs à une série de fou-rires de fêtard…
-Je n’en sais rien docteur. Je ne me souviens absolument de rien. Je me suis réveillé amnésique sur ma paillasse habituelle, en nage et souffrant comme un damné !
-Bien ! Pour commencer, voici une ordonnance destinée à tempérer votre affolement et apaiser vos traumatismes. Quatre jours d’arrêt de travail ne seront pas de trop. Il vous faut une grande boîte de pastilles effervescentes. Un comprimé matin, midi et soir dans un grand verre d’eau minérale. Et en sortant d’ici, vous irez prendre l’apéro. Et ce sapin vous allez vite me le rallumer, et bien avant de l’avoir abattu et d’en avoir tiré et raboté quatre belles planches…
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"Rallumer le sapin" est une expression indiquant la technique de reboire de l'alcool pour atténuer les effets désastreux d'une gigantesque gueule de bois.