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Un esprit bienveillant

Ce matin je me suis réveillé accompagné d’un fort sentiment d’apaisement inhabituel. Je n’avais même pas chiffonné les draps.

C’était parce que c’était un samedi et aussi parce que je venais de faire un beau rêve de fantôme. Une première du genre : J’y étais un fantôme qui avait pris sa retraite. Pas du tout du genre bling-bling avec de grosses chaines en acier, non ! D’ailleurs je ne portais même pas un drap officiel plus blanc que blanc. C’est tout moi ça !

Il m’arrivait encore par-ci par-là de sortir la nuit pour aller hanter un endroit. Mais ce n’était plus que pour le plaisir : Une simple excursion de fantôme qui ne fera plus jamais peur à personne et qui ne pincera plus le moindre orteil d’une victime endormie.

Cette nuit-là, pour une ronde de routine, je m‘étais rendu dans le manoir que je connaissais le mieux. Du moins avant que je le mette en vente. J’étais curieux d’aller y découvrir les transformations entreprises par les nouveaux propriétaires.

Je suis entré par le soupirail d’une cave pour commencer ma visite des lieux. Et puis j’ai réalisé que cette nuit là, je pouvais disposer à ma guise de deux options : la passe-muraille et la vision nocturne ! Des pouvoirs qui augmentent sensiblement le confort des explorations !

Les habitants des lieux n’étaient pas encore couchés. De la lumière tamisée filtrait sous la porte du grand salon. Alors je me suis glissé dans les chambres, les dépendances et les cuisines.

C’est là que je n’ai pas pu résister à faire comme chez moi : Je me suis jeté sur le congélateur et leur ai chipé leur tout dernier cône de crème glacée.

J’étais donc un fantôme qui avait des défauts, incapable de résister au péché de gourmandise. C’était tout moi, ça. Ca expliquait peut-être en partie l’absence de l’option drap plus blanc que blanc de série, celui dépourvu d’ouverture pour bouche à nourrir…

J’ai continué à inspecter les coins et les recoins de la bâtisse pour y découvrir quelques innovations intéressantes et quelques chouettes idées d’aménagement.

Avant de repartir, j’ai quand même jeté un coup d’œil furtif dans le salon. Les couche-tard étaient tous attablés et semblaient participer à une séance de spiritisme.

Ils invoquaient des esprits… Pourquoi pas hein, ai-je pensé. Mais ce serait sans moi, seul esprit présent dans la place et retiré des calèches ! Même si j’admets que cela aurait été très amusant de leur lâcher un caverneux “Ouiii, je suiiis encore làààààà… Meeeerciiiii pour la glâaaaace”…

Ca aurait vraiment été tout moi ça.

Mais comme cette intervention sans y avoir été invité aurait pu jeter un certain froid dans l’assemblée voire leur gâcher la soirée, j’ai préféré m’abstenir de me manifester : Une autre nuit peut-être, qui sait. C’est que j’ai toujours été pour la paix des ménages et aussi pour celle de ma conscience. A ce propos, j’espère qu’ils ne m’en voudront pas jusqu’à la fin des temps, pour la glace.

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A coller sur la porte de votre congélo pour une meilleure protection de vos vivres et de votre espace vital.

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Pressentiments d’hiver

J’ai plaqué mes deux pouces bien à plat sur les poignées de mes bâtons, pris une profonde respiration, fermé les paupières et ai improvisé une séance de spiritisme :

– Esprit de compétition, est-tu là ??? (écho, 3x)

Mais c’est hélas sans réponse de l’intéressé que j’ai du m’élancer sur la piste…

Il s’agissait d’une course de rattrapage. A vue de nez, je portais un numéro de dossard situé entre cent-quarante et deux-cents.

La veille, j’avais tenté de me soustraire à vie à une participation éventuelle à cette épreuve. J’aurais accepté sans ronchonner d’être classé bon dernier sur simple entente forfaitaire. Mais c’était le règlement qui stipulait que mon temps à l’arrivée et mon classement se devaient de figurer, avec ou sans mon consentement, dans le petit carnet officiel de mes exploits sportifs personnels.

J’avais conscience que mon échantillon d’esprit de compétition reposait en paix dans un congélateur et pouvais présager que nos fédérations nationales des sports d’élite allaient sans doute devoir se passer de mes futurs titres et médailles.

La trace labourée par les volontaires était profonde et le parcours avait été consolidé par un impitoyable gel nocturne. L’existence de ce sillon verglacé présentait un avantage certain pour moi : Je n’aurais donc pas à décoder la configuration des portes suivantes à chaque virage. Je pouvais slalomer sans prises de tête à condition de ne pas m’éloigner de l’ornière. Mais c’est pourtant en me concentrant sur le point de fuite de la trace, qu’une vision prémonitoire m’a propulsé sur la pente impressionnante d’un champ de neige poudreuse toute fraîche : Je m’y suis vu en train de godiller comme un expert du déhanché en figures libres ! Et j’étais chaussé de skis miraculeusement raccourcis de moitié.

Puis j’ai franchi le portique d’arrivée sans avoir raté une seule porte et surtout sans me faire éjecter du tracé par l’imprévisibilité des éléments. Et bien évidement aussi, sans arracher un chrono digne d’une place d’honneur sur une marche du podium.

C’est à partir de ce jour-là, que j’ai cessé d’invoquer le spectre de mon esprit de compétition et que j’ai adopté ma vision plus personnelle des plaisirs des sports d’hiver. Évidement mon adaptation à la godille dans les champs de poudreuse n’a pas été aussi instantanée que dans ma vision. Mais l’avantage était que quand, avant de me lancer, j’invoquais le soutien de mon esprit de contradiction, il était toujours au rendez-vous !

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< Ce petit rappel pour informer les anticonformistes que pratiquer le hors-piste peut aussi se révéler être une activité dangereuse et qu’elle est fortement déconseillée selon les périodes et les endroits. >

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