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Sang dessus-dessous

Pierre Auguste Renoir           Les amoureux

 

– Oh bonjour Monsieur Globule…

 

– Bien le bonjour à vous, madame Plaquette !

 

– Monsieur Globule, je suis inquiète : Vous m’avez l’air très fatigué aujourd’hui ! Racontez-moi vite ! Comment s’est elle passée cette journée ?

 

– Eh bien normalement je suis tenu au secret professionnel mais voilà je vous le confie quand même, parce que c’est vous, mais ne répétez ceci à quiconque… ON a commencé la journée par faire l’amour !!!

 

– Oh, je trouve que c’est une particulièrement bonne manière de débuter une journée !!! Vous devriez arborer une mine radieuse !

 

– Je vous l’accorde. Mais voyez-vous, pour commencer il a fallu faire appel à d’importants renforts pour approvisionner un corps caverneux, et ce imaginez le, dès les prémices du réveil.

A peine tiré sans sommation d’un rêve paisible, comme j’étais de garde, j’ai du immédiatement courir à destination d’où vous savez, sur les lieux même de l’opération, pour renforcer les besoins en afflux !

Et puis vous me connaissez de réputation, je ne me laisse pas coaguler dans mon coin. J’aime le travail bien fait et voyage volontiers là où c’est chaud et où il y a des festivités au programme !

Et dans le genre d’alerte en question, l’union fait la force, chacun doit y mettre du sien conformément au consignes de l’organisation. On ne peut pas se permettre une débandade !

 

– Une fort belle intervention à en juger par votre palpitant récit ! ! Et quelle fût alors la suite du programme ?

 

-Une pause café. Le remuant liquide fût servi sous une forme très concentrée et sur un plateau sur les lieux même de l’enthousiasme.

ON est resté dans de beaux draps, bien froissés ! De quoi nous faire un sang d’encre quant à la suite des réjouissances !

Bien entendu, les battements ont repris de plus belle et dans les vaisseaux, nous avons tous été sévèrement secoués par vagues successives.

Bien accrochés, nous avons attendu une accalmie et … contre toute attente, sans ne pouvoir nous accorder aucun répit, nous avons immédiatement été remis à rude contribution…

C’était bien notre veine, si je puis me permettre une petite facétie !

 

– Ah que s’est il passé, ON a enchaîné avec une seconde tasse d’espresso ?

 

– Non ! ON a encore fait l’amour !

 

– Oh mais ON semble tenir une forme éblouissante dites moi ! J’imagine sans peine que vous vous apprêtiez à vivre une de ces trop rares mais intenses journées à caractère sportif ?

 

-Bah non quand ON se rencontre, c’est presque chaque fois pareil ! D’abord ON nous fait miroiter une grasse matinée suivie de quelques faiblards élans de tendresse.

ON est sensés se la couler douce, à profiter du repos du guerrier qui revient rompu, de longues croisades…

Il faut comprendre, nous, après avoir entendu dire que certains collègues de la concurrence sont de service de piquet uniquement le samedi et encore, le plus souvent en moyenne un sur trois, les mois de légère élévation de température de l’atmosphère, et nous, qui nous coltinons la circulation au quotidien, nous faufilons difficilement sur les grandes artères, aux heures de pointe, on se sent bien mal lotis  !

Et puis ON croit dur comme fer que l’amour c’est logé en plein dans le cœur. Et qu’il faut absolument accélérer le rythme de ses pulsations en procédant à divers exercices périlleux et forts épuisants pour prouver et maintenir la force de cet amour.

Si ça continue, je ne vais faire qu’un tour, et je vais finir par voir rouge ! J’arrêterai le service de piquet et je demanderai ma mutation, voire ma transfusion au service des transports du système immunitaire.

 

– Oui mais c’est certainement parce qu’ON est du matin ! Au petit jour, ON se sang frais comme une rose, pas encore de trace du moindre signe de risque de défaillance, de fatigue démotivante, dus à une pénible journée…

Tôt le matin, avant d’entrer en scène, le désir de se produire des artistes est intense et fougueux et le funambule est déjà, par nature, fièrement dressé, en parfait équilibre… Et le soir venu, vous êtes tranquille !

 

– Hé bien, par ici notre véritable problème, c’est qu’ON est du matin ET du soir ! Et c’est sans compter que nous espérons tous, afin de minimiser les risques potentiels d’infarctus, que n’ait jamais lieu en plus de cela, une sieste crapuleuse non planifiée !

 

– Oh bon sang, mais alors là, vous êtes carrément surexploités ! Je compatis de suite à votre désarroi !

Mon cher Monsieur Globule, gardez espoir et moi je prierai nuit et jour pour vous et tous vos semblables. Et pour qu’ON aspire à plus de modération et surtout pour qu’ON ne vous mette pas encore plus de pression en vous imposant une substance hyperactive issue d’une petite pilule bleue dont le seul le but est d’intensifier votre productivité !

 

Le bazar des tuyaux

 

 

– Bonjour madame, excusez-moi mais je suis, depuis quelques heures, à la recherche d’un article et il m’est impossible de le trouver.  Pourtant, ce n’est pas faute de le chercher dans tous les recoins de votre boutique, et comprenez-moi, je suis un peu pressé par le temps.

 

– Bonjour Monsieur ! De quel genre d’article s’agit-il exactement?

 

– D’un article du genre sensationnel, voyez-vous, ça serait de préférence pour la une ; pas une simple dissertation destinée à la rubrique des faits divers ou pour les entrefilets des chats et des clefs perdus d’un quotidien ennuyeux. Eventuellement si vous aviez, quelque chose de bien sombre, qui pourrait noircir ma page blanche, vous m’arrangeriez !

 

– Je vois ce qui vous conviendrait Monsieur : Une exclusivité, un scoop en quelque sorte. Je vous demande de patienter un instant j’interroge mon ordinateur pour voir si nous avons encore ce genre d’articles en stock … … …

Non, vous m’en voyez désolé cher client, mais nous avons vendu le dernier papier renversant, que nous avions encore en magasin, ce matin même. Et la prochaine livraison de nouvelles fraîches et cyniques, ça ne sera en principe, que lundi prochain. En ce moment c’est plutôt calme dans ce monde injuste et obscène.

 

– Mais que c’est embêtant cela ! Et des photographies choquantes de célébrités en mauvaises postures, des prises de vues scandaleuses ou embarrassantes, vous en avez encore en rayon ? Je pourrai toujours broder un tantinet au niveau éditorial, entre nous, j’avoue que j’en ai maintenant plus ou moins pris l’habitude.

 

– Oui là vous tombez bien ! Nous avons en promotion des images d’une jeune chanteuse considérablement éméchée et pas du tout à son avantage sortant d’une boîte de nuit et il nous reste aussi, entre autres, celles d’un acteur qui casse la gueule à un paparazzo sur un parking. Voulez-vous que je vous imprime la liste de prix et le détail des arrangements que nous avons conclus avec les intéressés en mal de popularité ?

 

– J’hésite, votre offre est alléchante, mais je crois finalement que je vais d’abord essayer de contacter mes autres fournisseurs de sensationnel. J’espère que d’ici à ce que nous mettions sous presse, j’aie encore un événement croustillant, un malheur de dernière minute ou un rebondissement quelconque à me mettre sous la plume, que je puisse encore pondre, dans l’urgence, un chapitre scabreux là-dessus. En attendant, à vous, je souhaite encore une bonne journée Madame…

 

 

Entretien au comptoir du « Glue Bar »

–          Garçon, s’il vous plaît servez moi vite un Scotch, frais mais sans glaçons !

 

–          C’est un club privé ici Monsieur, seriez-vous un nouvel adhérent ?

 

–          Non, mais je vous assure que déshydraté, je peux être un sacré port de colle !

 

–          C’est ce que j’ai pensé lorsque vous vous êtes collé au bar et ça se devine aisément au timbre de votre voix! Pas besoin même, de coller une oreille au dos de celui-ci d’ailleurs !

 

–          En effet, je suis l’un de ces clients qui, lorsqu’il a soif, peux se montrer collant. Inutile de me laisser sécher bien longtemps. Je m’agrippe immédiatement au moindre contact à même la matière, on me dit vite appliqué et « à prise rapide » …

 

–          Je vois et à part ça, que faites-vous dans la vie, vous faites aussi dans la bande adhésive, avec une troupe d’amis par exemple ?

 

–          Vous n’y êtes pas, je suis un pilote d’essai tout ce qu’il y a de solitaire. Et ce n’est qu’une fois désaltéré que je décolle…

 

Non mais il lui manque une case ?

-Si tu veux mon avis, nous ne sommes tous que des pions , et on on ne pourra rien y changer…

– Mais cesse donc de négativiser mon ami et soyons fous ! Allons tenter de tirer notre épingle du jeu là bas tout au fond…