L’opération “Mozerboard”

-Docteur, vous avez vu ? On a un problème !! Voyez, ici et là...

-En effet, j’ai vu ça ! Même si en 30 ans de bloc opératoire, je n’avais encore jamais vu ça ! Passez-moi le micro-tournevis cruciforme

-Voici votre outil. On n’a pas trouvé de donneur à 100% compatible ? Sommes-nous encore en présence de l’un de ces cas d’obsolescence programmée ?

-Je ne pense pas. Ce patient-là avait un Pentium Core I7 à quadruple cœurs de 7ème génération du millésime 2017. Et ce modèle de circuit est introuvable sur le marché, même dans les brocantes d’organes. Mais il fallait tenter l’impossible, alors on s’est rabattu sur un Core I3, très proche d’un point de vue mécanique. Il fallait tenter de sauver ce qui avait une chance de l’être. Passez-moi la pince à long bec à 45 degrés

-Tenez là voilà. Est-ce que je peux couper le circuit d’alimentation auxiliaire ?

-Oui, coupez tout, avant que le module de rechange implanté ne se mette à surchauffer. On va au plus vite devoir chercher un autre donneur compatible, qui nous fournirait un ventilateur adapté. Passez-moi le tube de pâte thermoconductrice

-Et voilà. Et maintenant, qu’allons-nous faire du patient ? Est-ce qu’on informe ses proches que nous avons été confrontés à des complications ou alors est ce qu’on les prévient qu’ils doivent commencer à envisager d’acheter du neuf ?

-On va maintenir le client en coma artificiel jusqu’à ce qu’éventuellement, on puisse trouver la pièce conforme. Et on informe les proches qu’on va tenter l’impossible et qu’ils ne doivent pas perdre tout espoir. Passez-moi une petite boite, pour les vis…

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J’ai un fort penchant pour la réparation. C’est une manie chez moi qui peut friser l’acharnement thérapeutique. Techniquement tout est toujours d’abord potentiellement réparable, comme “dans le bon vieux temps”. Et je peux faire preuve d’une obstination déraisonnable à vouloir dépanner des objets qui dysfonctionnent. Je pense que les batailles d’ordre technique, libèrent chez moi un niveau de dopamine comparable à celui qui anime ceux qui ont une forte addiction au jeu. Et je ressens une certaine jubilation, lorsque je suis parvenu à prolonger la durée de vie “de mon patient”. Et ce, que ce soit avec ou sans avoir eu à recours à de l’aide extérieure.

J’ai baptisé cette habitude pathologique le syndrome de MacGyver. C’est inspiré de la série originale du même nom. C’était un type futé et ingénieux qui bricolait de petits miracles avec les moyens du bord, comme par exemple un cure-dents, deux boulons et un élastique de pot de confiture..

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